PLM

Le PLM est-il dans une impasse ?

Depuis près de 20 ans, la gestion du cycle de vie des produits (PLM) est considérée comme « l’unique source de vérité » pour toutes les données liées aux produits, et comme plateforme de gestion de tous les processus, depuis la conception jusqu’à la commercialisation du produit. Pourtant, dans les faits, la portée du PLM reste beaucoup plus étroite. Très présent dans les phases de conception et d’industrialisation, le PLM ne s’est en effet pas encore imposé en fin de cycle, pour optimiser les étapes de retrait du marché et de recyclage.

Le PLM, et d’une manière générale la digitalisation de la chaîne de valeur, doivent encore se « connecter » aux processus de fin de vie des produits pour diverses raisons. D’une part, parce qu’il y a beaucoup moins d’attention sur les process couvrant ces phases. D’autre part, parce que ces pratiques de fin de cycle industriel varient Le PLM est-il Dans une impasse ? Traduit d’un article de Beth stackpole, paru dans Digital engineering. considérablement d’un secteur à l’autre, mais aussi de la durée de vie du produit et du type d’entreprise, ce qui rend complexe la formalisation de process spécifiques.

Voler en aveugle

Asheen Phansy, sustainability solution experience senior Manager chez Dassault systèmes explique que ce retard est notamment dû à l’absence de feuille de route. « Pour des raisons historiques, il est difficile de récupérer les données d’utilisation des produits par les clients, sans compter comment et où collecter les produits en fin de vie. L’industrie a mis en place un système qui établit qu’une fois sorti des lignes de fabrication, le produit devient le problème de quelqu’un d’autre… ». Par ailleurs, au-delà de la formalisation des processus internes de récupération des produits dans le cadre du PLM, les entreprises ont toujours eu des difficultés pour inciter leurs clients et partenaires de développement à participer à la gestion de fin de vie des produits. « et si vous savez comment gérer la récupération de vos produits, vous devez encore découvrir comment inciter les clients à les ramener et comment cela pourrait rapporter de la valeur ! » rajoutet-il.

Parallèlement, il n’y a pas de processus clairs définissant le stockage des données produits, ce qui est critique dans le cas des avions et des équipements industriels, qui ont des vies de plusieurs décennies.

« Qui peut savoir, comment démonter et éliminer correctement un produit dans 50 ans ? D’où provient cette information ? » questionne Michael Grieves, directeur exécutif au Centre for advanced Manufacturing and innovative Design à l’institut de technologie de Floride (FiT). Pour répondre à ces questions, Michael Grieves affirme que les fournisseurs devront prévoir dans leurs futures plateformes PLM de nouvelles structures pour stocker ces données.

Si l’on considère que les processus de récupération des produits en fin de vie ne sont pas liés à l’ingénierie, les plateformes PLM doivent donc être plus accessibles aux non-ingénieurs. Les spécialistes de la conformité, les agents de la chaîne d’approvisionnement, ainsi que les personnels impliqués dans la récupération et le retraitement des produits usagés doivent être en mesure d’interagir avec elles. Cette ouverture du PLM a déjà démarré avec la mise en place d’accès utilisateur par « role-based user », l’accès à des données autres que les fichiers CAO, ou encore l’intégration du PLM avec l’ERP, le SCM, mais il reste beaucoup à faire.

Concevoir pour durer

La multiplication des règles environnementales, tels RoHs et Reach, poussent à utiliser les plateformes PLM pour les respecter. Cependant, ces initiatives sont insuffisantes pour que le PLM soit employé dans les phases de récupération et de recyclage des produits. il reste une étape importante pour formaliser et organiser les process de fin de vie, c’est d’intégrer le démontage et les principes fondamentaux assurant la durabilité dès la conception des produits manufacturés. « aujourd’hui, la réalité, c’est que vous arrivez à l’étape du recyclage et que vous découvrez que la voiture n’a pas été prévue pour cela » explique John MacKrell, VP chez CiMdata. « il n’y a pas de remontée d’informations entre les spécialistes du recyclage et les concepteurs, ce qui fait que ces derniers ne connaissent pas précisément les besoins des premiers. »

Même si les principales offres PLM n’intègrent pas de processus spécifiques à la gestion de fin de vie des produits, les fonctions d’aide à la conformité et à une conception durable récemment intégrées ont eu un effet positif. Les solutions enovia PLM de Dassault systèmes, par exemple, permettent d’évaluer la conformité des produits, de choisir les fournisseurs en fonction de leur conformité environnementale, et de suivre l’état déclaratif des matériaux non conformes. De la même manière, la plateforme Teamcenter de siemens PLM software a évolué pour prendre en compte cette gestion des matériaux. elle intègre des capacités de gestion des matériaux pour une meilleure visibilité vis-à-vis des exigences environnementales et permet de gérer les données matériaux dans le cadre d’un référentiel centralisé des données produit. Enfin, ces fonctions de gestion peuvent être intégrées aux outils d’aCV (analyse du Cycle de Vie) pour évaluer en détail l’impact environnemental des produits.

« De nombreuses entreprises gèrent aujourd’hui les matériaux en dehors du système PLM, qui crée trop de silos de données » explique Bill Boswell, directeur Cloud services Marketing and Business strategy chez siemens. Pourtant, l’intégration de la gestion des matériaux au sein d’un outil PLM permet aux équipes d’ingénierie d’examiner les attributs et les propriétés d’un matériau avant qu’il soit sélectionné. « C’est une approche beaucoup plus proactive… permettant aux équipes d’ingénierie de comprendre l’impact environnemental qu’un produit aura en fin de vie, et bien sûr à quoi il ressemble avant de quitter l’entreprise » rajoute Boswell.

L’impact des objets connectés

L’arrivée massive des objets connectés peut changer notablement la portée du PLM vis-à-vis des process de récupération des produits. ils fournissent en effet un canal pour récupérer les informations liées à leur utilisation. « Cela permet d’optimiser, par exemple, les matériaux en tenant compte de l’environnement dans lesquels ils sont exploités, et de jeter les bases d’une amélioration de la qualité et des process de fin de vie », selon steve Chalgren, eVP, Product Management and Chief Strategy Officer chez Arena.

« si les ingénieurs ont une visibilité sur la qualité des produits vis-à-vis de l’aQ et ceci dans l’usine, ils peuvent optimiser la conception des produits pour minimiser les rebuts de production et éviter un cycle de vie plus court que prévu », explique steve Chalgren. « Des produits plus robustes, plus durables signifient moins de déchets dans leur production et moins de matières se retrouvant à la benne en fin de vie. » C’est pourquoi l’éditeur arena a mis en place un partenariat avec 1Factory, une plateforme de contrôle qualité. L’intégration avec des solutions ioT est une prochaine étape naturelle pour suivre les produits tout au long de leur vie, afin de faciliter leur récupération finale.

Très orienté ioT, PTC soutient également que les objets connectés et leurs jumeaux numériques ouvriront les possibilités quant à la récupération des produits en fin de vie. « L’accès à ces données à travers le PLM peut aider à déterminer si les matériaux et pièces sont recyclables ou récupérables » conclut Mark Taber, VP Marketing et Commercialisation chez PTC.

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