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Modélisation : paramétrique VS directe

La CAO est devenue depuis quelques années un maillon parmi d'autres de la chaîne des outils numériques utilisés pour concevoir, développer et industrialiser un produit manufacturé. Intégrée à la démarche PLM, la CAO 3D s'est progressivement standardisée dans la majorité des bureaux d'études. Et surtout elle a continué d'évoluer techniquement pour apporter d'avantage de confort et de productivité à ses utilisateurs. Avec comme point d'orgue le développement d'un nouveau paradigme de modélisation : le mode directe. Désormais, à l'heure du choix d'une solution, y a-t-il match entre modélisation directe et modélisation paramétrique, ce que l'on appelle aussi modélisation à base de fonctions (features based modeling en anglais) ? C'est le thème de ce dossier.

 

Géométrie fonctionnelle ou géométrie pure

Pour la petite histoire, le mode paramétrique, ou features based modeling est né il y a plus de 20 ans avec le lancement de Pro/Engineer par PTC. Les logiciels utilisant cette démarche de création géométrique 3D s'appuient sur des fonctions (features en anglais) telles qu'extrusion, arrondi, chanfrein, dépouille, coque, etc. Ces fonctions sont organisées dans un historique représenté sous la forme d'un arbre. L'ensemble décrit le produit et l’enchaînement des fonctions employées, ainsi que les liens qui les unissent. Ces liens permettent de lier des géométries à des contraintes fonctionnelles. Pro/E fut à l'époque une petite révolution dans le monde de la CAO. Tous les éditeurs ont suivi et développé leur propre solution de modélisation paramétrique à base de fonctions.

A notre connaissance, c'est l'arrivée sur le marché en 2005 de SpaceClaim et de sa solution éponyme qui a bousculé l'ordre de choses. L'éditeur américain propose alors une modélisation dire "directe". Dans ce cas, l'utilisateur conçoit sa pièce comme s'il manipulait une pâte à modeler 3D ; un Sketchup (de Google) à la sauce Solide en quelque sorte. On ne gère plus d'historique de fonctions, même si l'on conserve des contraintes entre les entités géométriques. La création utilise dans ce cas des fonctions comme pousser, tirer, pivoter, extruder, chanfreiner, etc. pour modifier des entités élémentaires de type sphère, cube et cône à partir de leur points d'inflexion. On peut également utiliser la cotation pour définir les dimensions d'un bloc et la position d'un trou par exemple. Une paramétrisation simple de la géométrie facilitant sa modification.

Depuis, la quasi totalité des éditeurs ont également adopté au sein de leur gamme des modules comparables. Synchronous Technology pour Siemens PLM Software dans Solid Edge puis dans NX, Inventor Fusion pour Autodesk, Catia Brep Modeling pour Dassault Systèmes, et Creo Elements direct Modeling de PTC grâce au rachat en 2007 de Cocreate, précurseur lui aussi de la technologie. Bref, un engouement pour une technique de création particulièrement simple d'accès et qui répond à de nombreuses applications.

 

La puissance du paramétrique

On le constate aujourd'hui, la modélisation directe n'a pas évincé le mode features based. Pour Bruno Chollat, qui revend SpaceClaim (racheté il y a peu par Ansys) sur le territoire français, "on peut faire une analogie amusante avec le four à micro-ondes et le four traditionnel. La plupart des ménages en sont équipés aujourd’hui, et chacun utilise l'appareil en fonction du plat à réaliser. Il y a un recouvrement entre les deux méthodes de modélisation et les frontières ne sont pas fixes".

Le paradigme de modélisation paramétrique répond à une approche de conception technique et fonctionnelle. Le concepteur doit avoir une idée relativement précise de ce qu'il va faire pour anticiper et définir les contraintes des fonctions et les dépendances. Toute modification de la conception est ainsi répercutée en aval, d'une manière prédéfinie.  En tirant parti de l'arborescence, les utilisateurs peuvent mettre en forme des changements rapides à leurs modèles 3D qui seront automatiquement propagés à d'autres fonctions connexes ou dépendantes. "En outre, le mode paramétrique permet de capitaliser la sémantique métier et de préparer des Template Design", rajoute Fabrice Agnès, directeur User Experience Catia chez Dassault Systèmes. Ce mode est donc particulièrement puissant pour intégrer de l'intelligence à un modèle, lui permettre d'évoluer et d'être décliné en plusieurs versions. "Mais cette puissance n'est utilisable que si l'opérateur connaît la construction du modèle et son paramétrage", explique Thierry Simon Expert technique CAO chez PTC.

Or, c'est parce qu'il est rarement possible d'anticiper en phase conceptuelle, et parfois impossible de connaître l'intentiondu concepteur lorsque l'on récupère son travail, que le mode paramétrique a ses limites. "Cette modélisation intelligente a fait apparaître chez de nombreux utilisateurs une grande frustration lorsque la complexité résultante de l'arbre du modèle donne lieu à une modélisation finalement impossible à gérer. La rigidité de la modélisation basée sur le paramétrique rend l’outil inefficace pour la modélisation d’un concept ou pour faire des changements de dernière minute" signale Hugues Drion, directeur commercial Europe d'Autodesk pour la branche Manufacturing.

 

Ou la souplesse du mode direct

La modélisation directe répond, elle, à une stratégie purement géométrique. Elle permet de se concentrer sur la création pure, et non sur les fonctions CAO permettant de matérialiser son idée. Elle est donc particulièrement adaptée aux phases de recherche conceptuelle, où les modifications et itérations entre concepteurs et ingénieurs sont fréquentes. Une étape qui exige souplesse de modélisation et rapidité d'action. En outre, les logiciels qui la proposent sont beaucoup plus faciles à manipuler. Les utilisateurs de logiciel 2D peuvent conserver leur habitudes de travail, progresser vers la CAO 3D, voire se former seul à la modélisation directe. C'est le cas par exemple de Nicolas Menanteau, dessinateur au sein de la société Bida qui conçoit et fabrique des aménagements et du mobilier de grandes surfaces. "J'utilise conjointement Autocad et SpaceClaim. Ce dernier me permet de créer très rapidement des pièces de tôlerie, même si les formes sont complexes, tout en gérant les spécificités du métier. L'outil assure également la mise en plan et la cotation automatique. On peut travailler sur  …

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