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Numérique et traditions

Didier Girardet, architecte DPLG et président du cabinet d'architectes ACD Girardet & Associés

 

L'agence ACD Girardet & Associés installée à Versailles depuis 1983 s'est taillé une solide réputation dans la conception d'équipements sportifs. Elle a notamment travaillé sur le golf de Saint-Quentin-en-Yvelines, qui accueillera la Ryder Cup en 2018, et sur les différentes évolutions du site de Rolland Garros depuis 25 ans. On peut également citer le palais des sports d'Issy-les-Moulineaux, celui de Plaisir, mais aussi des équipements plus modestes à Tigery ou Chaville.

 

Cad magazine : Quelle est l'évolution majeure des projets sportifs que l'on vous confie ?

Didier Girardet : Les équipements sportifs modernes ont désormais une vocation sociale large avec l’accueil de spectacles, de manifestations. A Issy-les-Moulineaux par exemple, la salle est employée aussi pour des concerts, des meetings politiques, ou encore pour les vœux annuels du Maire. Le stade de Roland Garros, c'est 15 jours de très forte activité tennis, mais c'est une vie plus ouverte tout le reste de l'année, avec des séminaires, des conférences et d'autres événements publics ou privés. Cette polyvalence de plus en plus fréquente doit être prise en compte au plus tôt dans la conception des projets.

Sur un projet comme Roland Garros, la contrainte supplémentaire est la fenêtre de tir pour exécuter les travaux, qui ne laisse place à aucune erreur : 10 mois point final. Il nous est déjà arrivé de démolir plus de la moitié du court central et de le reconstruire pour la saison suivante ! Cela exige une organisation sans faille et une étude de qualité pour fluidifier derrière les travaux. Mais aussi une bonne compréhension entre maître d'ouvrage et maître d’œuvre.

 

Cad magazine : Quel est votre sentiment vis-à-vis des outils informatiques que vous utilisez dans votre agence ?

Didier Girardet : J'ai un rapport presque passionnel avec l'informatique : du très positif à l’embarras. Il est évident que les logiciels de modélisation, de calcul, de rendu réaliste ont ouvert de nouvelles perspectives pour présenter les projets, produire les études et répondre aux différentes phases de projet. Mais l'informatique peut avoir un effet pervers, notamment lors des concours. Selon moi, c'est avant tout l'idée du projet présenté qui doit séduire et non la débauche de moyens numériques mis en œuvre. La conception numérique exige un fort investissement initial, parfois au détriment de la demande initiale du concours.

 

Cad magazine : L'intégration de ces solutions a-t-elle impacté vos méthodes de travail ?

Didier Girardet :  L'informatique a totalement bouleversé notre quotidien. Dans le cadre d'une approche traditionnelle à base de plans 2D, on a une vue transversale et linéaire de l'évolution du projet. On peut donc facilement corriger des erreurs conceptuelles, avant qu'elles n'entraînent des répercussions majeures. Avec une conception 3D dès le départ, et sa prolongation jusqu'au DCE et parfois au delà, on obtient un résultat certes plus précis, plus complet, mais aussi plus tardif. Il faut donc se laisser des marges de manœuvre. Il ne faut pas être avare de sorties intermédiaires du projet, se voir fréquemment entre intervenants. Et puis, j'aime bien qu'un architecte, qui a des compétences informatiques poussées, prenne un calque et un crayon, se pose sur une sortie papier issue du numérique pour évaluer très rapidement d'autres idées.

Il faut également souligner les capacités fantastiques des logiciels pour faire des images ou des films, ce qui transforme peu à peu notre activité d'architecte vers un métier de communication. Ils permettent également aux maîtres d'ouvrage de comprendre finement des détails complexes, les flux des usagers au sein des constructions, de visualiser des ombres portées, etc. On s'évite ainsi bien des discussions et d'interprétations erronées. Mais sur les projets, je continue souvent à gérer une maquette physique traditionnelle, ce qui permet un dialogue enrichissant avec nos spécialistes du numérique. Finalement, c'est un aller-retour constant entre démarche traditionnelle et démarche numérique pour pouvoir bénéficier des avantages de l'une et de l'autre.

 

Cad Magazine : Utilisez-vous des outils de collaboration et qu'apportent-ils ?

Didier Girardet : Oui, nous avons adopté Team Work, un module associé d'ArchiCAD. Cet outil facilite la synchronisation des architectes travaillant sur les différentes parties d'un projet, et notamment leur capacité de travailler en parallèle avec les bureaux d'études partenaires. D'où une réactivité forte et un dialogue plus constructif. Mais cela exige également de bien préparer le terrain, de définir une charte graphique précise, de s’entendre sur le découpage du projet, etc. Et cela ne doit pas se substituer à des rencontres régulières entre les différents acteurs, ne serait-ce que pour convaincre les collaborateurs qu'ils travaillent bien sur le même projet, sur les mêmes versions, et dans la même direction.

 

Si vous souhaitez voir l'interview vidéo complète de Didier Girardet, rendez-vous sur le site : cad-magazine.com.

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